C’est certes un peu ardu à lire… mais il est tellement essentiel de comprendre pourquoi il y a aujourd’hui une crise de l’énergie qui plonge de nombreux ménages dans des difficultés importantes et qui met les collectivités au bord du gouffre…. Cela vaut le coup de prendre cinq minutes pour découvrir cet article d’Alain Tournebise, paru dans le numéro de septembre/octobre 2022 de la revue économique du PCF, « Économie et Politique ».
La suite….
Un peu d’histoire
Naguère, à peu près partout dans le monde, le système électrique était exploité par un monopole, monstruosité absolue pour tout économiste libéral. Qui plus est, ce monopole était intégré, c’est-à-dire en charge de la production d’électricité, de son transport à grande distance et de sa distribution aux clients finals. Pas supplémentaire dans l’horreur économique, ce monopole était le plus souvent public, comme en France avec EDF.
Il n’en reste pas moins que pour des multinationales en recherche permanente de nouvelles sources de profit, cette appropriation publique d’un secteur porteur constituait un gâchis terrible. Dès les années 80, sous l’impulsion politique de Reagan et Thatcher, une brochette d’économistes s’est attelée à théoriser l’inefficacité du monopole public, les bienfaits du marché et – déjà – du ruissellement des profits pour le bien être des consommateurs.
S’en est suivie une vague de privatisation et de mercantilisation de l’industrie électrique qui, très rapidement – les mêmes causes produisant les même effets – a renvoyé le secteur électrique à ses démons d’avant-guerre : prix élevés, sous-investissements, fiabilité déficiente.
Pour libéraliser le secteur on a d’abord dissocié les trois principales fonctions : production, acheminement par les réseaux et commercialisation.
On a abrogé le monopole de production en permettant à tout un chacun de produire de l’électricité. On a séparé les réseaux d’acheminement des autres fonctions de production et de commercialisation, Parallèlement, on a permis aux gros clients et aux commercialisateurs d’acheter ou de vendre directement de l’électricité en utilisant les réseaux moyennant redevance. C’est l’accès des tiers au réseau ou ATR.
Ainsi, là où il y avait un seul opérateur, on a multiplié les producteurs (en France EDF, Engie, Total et plusieurs dizaines de petits producteurs d’électricité renouvelable mais aussi des producteurs produisant dans des pays voisins et exportant en France). On a créé des gestionnaires de réseau (RTE pour le transport en haute tension et Enedis pour la distribution en basse tension). Ces réseaux constituant des monopoles naturels, ils doivent, dans la doxa libérale, être régulés, c’est-à-dire que leurs prix doivent être contrôlés, voire fixés, par une entité pour éviter tout abus de position dominante. Dans la plupart des pays, cette mission a été confiée à un régulateur extérieur « indépendant », en France, la CRE (Commission de Régulation de l’Énergie.)
Enfin, des « commercialisateurs ou fournisseurs » (grossistes ou épiciers) qui vendent au consommateur final de l’électricité qu’ils produisent ou qu’ils achètent en gros à d’autres. Tous ces braves gens ne travaillant pas pour rien, cette pandémie a considérablement alourdi les coûts de l’électricité pour le consommateur final.
Comment se déroulent les échanges d’électricité en France dans ce schéma désormais ?
Depuis 2007, le consommateur final d’électricité est « libre » de choisir à qui acheter son électricité : c’est son « fournisseur ». Ce fournisseur peut être un producteur qui vend ainsi son électricité directement à son client (de gré à gré). En France, aujourd’hui la grande majorité des échanges ont lieu ainsi. Mais il peut aussi choisir d’acheter son électricité à un revendeur qui ne produit pas son électricité, mais qui l’achète en gros sur le marché et la revend au détail. C’est ainsi qu’on a vu se multiplier les fournisseurs dits « alternatifs » et se développer des offres exotiques telles que celles de Leclerc qui ristourne 20 % du tarif EDF en… bons d’achats !
Pour permettre ce développement du mercantilisme électrique, on a instauré deux dispositifs : le marché de gros et l’ARENH.
À suivre…