18 heures

Retraites : les trois scénarios envisagés par le Conseil constitutionnel

Les Sages rendront vendredi 14 avril à 18 heures leur verdict sur l’avenir de la réforme des retraites du gouvernement. Trois options sont sur la table.

Tous les yeux seront rivés sur lui. Le Conseil constitutionnel rendra vendredi 14 avril ses décisions sur la réforme des retraites. Trois scénarios sont sur la table, du probable rejet de certaines mesures à la censure complète, en passant par un premier pas vers un référendum. Tour d’horizon.

La probable censure partielle

Pro-réforme et opposants s’attendent tous à ce que certaines mesures du projet de loi passent à la trappe. Parmi les propositions en danger figure l’index séniors, qui doit obliger les grandes entreprises à déclarer les salariés de plus de 55 ans, mais pourrait constituer un cavalier législatif. L’index devrait cependant être repêché dans un futur projet de loi. L’expérimentation d’un nouveau CDI en fin de carrière est également menacée.

Une censure partielle serait un moindre mal pour l’exécutif, qui pourrait arguer que le cœur du réacteur – le report de l’âge légal à 64 ans – est validé. « Le Conseil irait dans le sens où il a toujours été », à savoir « ne pas contrer les grandes réformes sociales ou sociétales », estime Lauréline Fontaine, professeure de droit constitutionnel et autrice de La Constitution maltraitée (Amsterdam).

« S’il y a censure de points […], mais pas des 64 ans, alors ça ne répondra en rien à la conflictualité sociale », a prévenu le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger. Des élus de gauche ont déjà annoncé qu’ils continueraient à exiger le retrait de la réforme. Sur le papier, une validation complète du projet de loi, sans la moindre censure, est également possible, mais improbable, d’après plusieurs constitutionnalistes interrogés.

Le vertige de la censure totale

Les opposants au texte la réclament, et invoquent notamment un détournement de l’esprit de la Constitution par l’exécutif. Pour faire passer la réforme, celui-ci a utilisé un budget rectificatif de la Sécu, ce qui a restreint la durée des débats parlementaires. Un choix « motivé par aucun autre motif que celui de l’opportunité », a tancé le député PS Jérôme Guedj, qui a aussi évoqué des débats « insincères », notamment sur la revalorisation des petites pensions.

Élina Lemaire, professeure de droit public à l’Université de Bourgogne, souscrit à certains arguments, mais reste circonspecte quant à un rejet pour « détournement » de procédure : « Il faudrait en quelque sorte que le Conseil aille scruter la conscience du gouvernement, ce qu’il s’est toujours refusé à faire. »

« Ce n’est pas parce que la procédure est inhabituelle qu’il faudrait la censurer », estime le constitutionnaliste Didier Maus. Il soulève pour sa part de potentiels « pièges constitutionnels » : si les Sages estimaient que la réforme aggrave la situation des femmes ou de certaines carrières longues, et qu’il y a « rupture d’égalité ».

Cela pourrait conduire à un gros coup de ciseau dans les articles du projet de loi. Reste l’hypothèse d’un acte fort des Sages. En 1971, ils avaient élargi spectaculairement leur champ d’action en se plaçant en garants des libertés fondamentales. Mais un demi-siècle plus tard, ils sont toujours accusés par certains juristes de docilité envers l’exécutif. « Il pourrait y avoir à nouveau l’occasion d’un coup institutionnel, en se plaçant en gardiens de la Constitution face à l’exécutif », avance prudemment Élina Lemaire.

Réforme + RIP : fausse égalité

Les Sages pourraient faire coup double : ne pas censurer l’essentiel de la réforme, et valider la procédure de référendum d’initiative partagée (RIP) de la gauche. Ses initiateurs veulent soumettre à une consultation nationale une proposition de loi afin que l’âge de départ à la retraite ne puisse pas dépasser 62 ans. Les conditions requises semblent réunies (signatures de parlementaires, champ de la proposition…), et le feu vert au RIP est « probable », considère Lauréline Fontaine.

Jean-Éric Schoettl, ancien secrétaire général du Conseil constitutionnel, et Jean-Pierre Camby, professeur associé à l’université Paris-Saclay, alertent toutefois dans Le Figaro : l’injonction d’un âge de départ qui « ne peut pas être fixé au-delà de 62 ans » pourrait « contraindre la loi future » et faire tiquer les Sages.

Même en cas de validation, la route reste longue. Il faudrait que la proposition recueille 4,8 millions de signatures citoyennes en neuf mois, et qu’elle ne soit pas examinée durant les six mois suivants par l’Assemblée nationale et le Sénat, pour qu’elle soit soumise à référendum. Reste à savoir ce que déciderait Emmanuel Macron si cette perspective se dessinait au soir du 14 avril. Certains à gauche l’appellent à imiter l’ancien président de la République Jacques Chirac, qui avait promulgué mais jamais appliqué le CPE (contrat première embauche), combattu par la rue.

Quentin Marchal pour Le Point (avec AFP)

Photos de la manifestation parisienne du 13 avril 2023, S.B.

7 réflexions sur “18 heures

  1. Réforme des retraites : que pourrait censurer le Conseil constitutionnel ?

    Saisi par la première ministre et des parlementaires d’opposition, le Conseil constitutionnel fera connaître sa décision sur la réforme des retraites ce vendredi 14 avril. Les mesures pour favoriser l’emploi des seniors, ou même des dispositions du compte pénibilité, pourraient être censurées par les Sages. Mais certains juristes n’écartent pas une censure totale au nom de « l’atteinte à la sincérité du débat parlementaire » et d’« un détournement de procédure ».

    Lire la suite de l’article : https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/reforme-des-retraites-que-pourrait-censurer-le-conseil-constitutionnel-243837

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  2. SOAZIG QUÉMÉNER

    DÉMOBILISATION :
    La réforme des retraites va aussi laisser des traces chez les macronistes.

    On le sait, le choix de déclencher l’article 49 alinéa 3 de la Constitution sur un texte aussi emblématique a heurté les députés de la majorité à l’Assemblée. Emmanuel Macron a d’ailleurs dû inviter les parlementaires de son camp à l’Elysée pour s’en expliquer. Mais depuis, les mêmes lui ont infligé un sérieux camouflet en retoquant la nomination de Boris Ravignon, un proche du chef de l’Etat, à la présidence de l’Ademe, l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie. Boris Ravignon prétendait en effet demeurer le maire de Charleville-Mézières, ce qui a fortement déplu aux députés.

    Sans compter que ce dernier est encarté LR…

    « Les députés sont toujours légitimistes. En revanche, on constate une certaine forme de démobilisation », observe un membre de la majorité à l’Assemblée. Autre signal, la prise de distance de quatre députées, parmi lesquelles l’ancienne ministre Barbara Pompili, qui siègent maintenant en apparentés au groupe Renaissance « histoire d’avoir plus de latitude pour exprimer leurs nuances ».

    Comme une désolidarisation silencieuse.

    C’est dire si la macronie guette à présent les signaux venus de l’Elysée, espérant que le chef de l’Etat ne se contente pas de promettre un énième « changement de cap et de méthode ». Leitmotiv qui fatigue jusque dans son propre camp.

    Twitter @SoazQuem
    Crédit photo : Lionel Antoni pour Marianne

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  3. PAs glop ! TouKC

    Le Conseil constitutionnel devrait donner demain vendredi son feu vert sur la demande de lancement d’une telle procédure.

    Ce sera alors le début d’un parcours long de neuf mois pendant lequel s’ouvrira une campagne permettant ou non de recueillir les 4,87 millions de signatures.

    Si ces dernières sont recueillies, le référendum n’aura pas lieu automatiquement, le Parlement aura six mois pour se saisir de la proposition de loi : une solution au conflit des retraites qui apparaît être un très long chemin…

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  4. Marie-Do Mage

    J’ai vu sur les panneaux d’affichage à Bezons qu’il y avait une réunion de la Nupes demain à 10h à la maison du peuple du Pcf.
    Une occasion pour pointer le bout de notre nez ?
    A noter que c’est écrit en haut de l’affuche que c’est une « réunion nupes – pcf »…
    Ils ont oublié de mettre les autres composantes de la nupes ?

    Dommage!
    Coquille ou fait exprès ?

    Demain, ce ne sera pas Bezons Ensemble….

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  5. Marylise L.

    Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a annoncé mercredi qu’il quitterait au 21 juin ses fonctions à la tête du premier syndicat français, mettant en avant une « décision mûrement réfléchie ».

    « Je pense que, le 21 juin, je laisserai une CFDT qui va bien », déclare M. Berger dans une interview au Monde, précisant avoir proposé au bureau national que ce soit Marylise Léon, actuelle numéro deux, qui lui succède.

    A la tête de la CFDT depuis 2012, M. Berger âgé de 54 ans, rappelle qu’il avait annoncé lors du congrès de l’organisation en juin qu’il s’en irait en cours de mandat.

    « Ce n’est ni un coup de tête ni un choix dicté par l’actualité », assure-t-il au Monde, jugeant normal que la CFDT « se renouvelle ».

    Le nom de Marylise Leon, secrétaire générale adjointe depuis 2018, circulait de longue date pour lui succéder.

    « Elle est capable, avec l’équipe qui sera autour d’elle, d’impulser un nouvel élan », affirme M. Berger, saluant une syndicaliste « dynamique » qui « a une compréhension du monde du travail qui est forte ».

    Laurent Berger réfute l’idée que son départ, en pleine crise liée à la réforme des retraites, puisse affaiblir le mouvement social, estimant que le syndicalisme « sort gagnant de cette période ».

    Il réaffirme par ailleurs qu’il ne s’engagera pas en politique estimant que « certains, parmi les soutiens du chef de l’Etat, ont voulu accréditer cette idée pour (lui) nuire et pour nuire à la CFDT ».

    AFP, publié le mercredi 19 avril 2023 à 12h44

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