L’énergie, bien commun de l’humanité (2)

Intervention de clôture du colloque organisé par la Fondation Gabriel Péri dans les locaux du Sénat, les 17 et 18 mars 2023 : « Énergie, bien commun à l’échelle de l’humanité ? »

Extraits des points clés de la synthèse tirée par Valérie Gonçalvès – samedi 18 mars 2023

« Tout d’abord, permettez-moi de m’associer aux intervenants qui ont soutenu les luttes et manifestations contre la réforme des retraites injuste et inutile.

Je crois que je peux toutes et tous vous associer pour remercier la Fondation Gabriel Péri, Alain Obadia, son président, Louise Gaxie, sa directrice, Chrystel Lemoing, Myriam Massou, et les bénévoles qui ont travaillé à son organisation, ainsi que le groupe Communiste, républicain, citoyen et écologiste du Sénat et sa présidente Éliane Assassi, d’avoir pris l’initiative de ce colloque.

Je remercie également tous les participants, notamment nos invités étrangers pour leur apport à la qualité et à la pertinence de nos travaux, ainsi que le graphiste Pablo Ka, qui a conçu l’affiche qui représente si bien le thème du colloque, et Antoine Blocier, qui a écrit le conte « Sommet des Terriens » pour mieux nous aider à nous projeter vers un avenir meilleur.

Cette initiative nous a permis de débattre, avec la participation de personnalités d’horizons divers, syndicalistes, spécialistes, universitaires, responsables politiques, responsables d’entreprises, et de le faire par-delà les frontières. Les exposés et les échanges n’ont pas esquivé, au contraire, la complexité des problèmes à affronter, seule voie pour construire des convergences et des solutions durables.

L’énergie est étroitement liée d’une part à la réponse aux besoins humains, pour que chaque être humain puisse vivre dans des conditions dignes de notre temps, et d’autre part à la réponse aux enjeux climatiques, car la maîtrise des sources d’énergie à l’échelle mondiale pour limiter drastiquement le recours aux énergies fossiles est un impératif incontournable dans la lutte contre le dérèglement climatique. C’est ce qui fonde le sujet de ce colloque, l’énergie comme bien commun à l’échelle de l’humanité. C’est dans cet esprit que la table ronde « Droit à l’énergie : réalités et contradictions. Quelle place pour l’énergie dans la gouvernance mondiale ? » a ouvert nos travaux.

La table-ronde sur le marché européen de l’énergie a permis de faire un constat sans appel : la déréglementation, la mise en concurrence ont tenu lieu depuis plus de 20 ans de politique européenne de l’énergie.

Le marché est un échec, il a échoué.

Le résultat est dramatique pour les populations avec des prix qui ne cessent de grimper, une précarité qui grossit et pour les salariés détérioration des conditions de travail et perte d’emplois qualifiés si utile pour mettre en œuvre une transition énergétique.

L’absence de politique d’indépendance énergétique à l’échelle de l’Europe amène à substituer une dépendance vis-à-vis du gaz de schiste américain ou qatari à celle de la Russie.

Cela se pose également vis-à-vis des métaux et terres rares nécessaires à la transition énergétique. Récemment émise, la proposition de réforme du marché européen de l’électricité faite par la commission européenne ne vise en aucun cas le changement de paradigme. La logique est toujours celle du marché.

Si le choix des technologies utilisées pour la production d’énergie appartient à chaque État, je veux souligner que le nucléaire ne peut être mis sur le même plan que les énergies fossiles. Tout simplement parce que les accords internationaux doivent prévaloir. Or ni la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, ni les accords internationaux signés depuis, ni le GIEC, 4 ne prévoient une sortie du nucléaire, en revanche, ils prévoient que les pays développés décarbonent leur énergie.

La table ronde sur la propriété et la maîtrise sociale a mis en évidence un besoin d’appropriation sociale du secteur de l’énergie en plus du contrôle public.

L’énergie parce qu’elle doit être considérée comme un droit humain, ne doit pas être soumis aux règles du marché. La politique énergétique demande de la planification sur le long terme dans un cadre de cohérence avec des financements et investissements à hauteur des enjeux.

Le Parti Communiste Français propose non seulement de s’appuyer sur les grandes entreprises du secteur que sont EDF, Engie et TOTAL, qui doivent être renationalisées et gérées démocratiquement, avec de réels pouvoirs d’intervention des salariés, des citoyens et des élus, mais aussi de créer un « pôle public de l’énergie » qui doit être pensé comme une organisation du secteur permettant une gestion cohérente et planifiée.

Il permettrait de poser les enjeux en matière de souveraineté et sécurité énergétique, d’élaborer des propositions sur le mix et les infrastructures, fixer des tarifs transparents, coordonner les efforts de recherche et les besoins futurs, etc…Il y a quelques années, les parlementaires communistes ont déposé un projet de loi qui dessine les contours de ce pôle public.

La table-ronde sur le rôle de la France et de ses entreprises à l’international a montré que la volonté de souveraineté énergétique n’implique pas une vision recroquevillée de la France. Au contraire, cela doit impérativement s’accompagner de la volonté de promouvoir la coopération internationale.

Les pays qui maîtrisent les technologies les plus avancées ont un rôle à jouer pour offrir aux pays du Sud des perspectives de développement décarbonées. Les entreprises, les centres de recherche de notre pays peuvent y contribuer. Cela met à l’ordre du jour la question des transferts de technologies. Les salariés, les chercheurs, les ingénieurs de notre pays peuvent prendre leur part avec enthousiasme à cet effort, ce qui contribuerait à redonner du sens à leur travail et à leurs recherches, trop souvent détournés vers la seule recherche du profit à tout prix.

Cela m’amène à la dernière table-ronde, « Recherche, technologies : quelles perspectives et quel partage des connaissances ? »

Le débat citoyen et la décision démocratique sur les choix à mettre en œuvre en matière d’énergie doivent s’accompagner d’un effort sans précédent dans le domaine de la culture scientifique et technique, afin que chacun ait accès aux données de base. On ne peut laisser le champ libre à ceux qui font leur miel de l’ignorance pour répandre les « informations » les plus farfelues, et faire fi des réalités scientifiques et de l’expérience.

S’agissant des progrès scientifiques et techniques, comme dans le domaine de la santé, le combat est également à mener contre l’appropriation capitaliste des connaissances. Les questions de l’énergie et du climat sont si cruciales qu’on ne peut accepter un tel frein à la mise en œuvre des technologies qui permettent et permettront à l’avenir une énergie plus propre pour le bien de tous.

Cette initiative en appelle d’autres, et nous sommes ouverts à toutes les propositions que vous pourrez faire en ce sens. 

Nous pourrons ainsi, comme le président du Brésil, Lula, nous y invitait lors de la COP 27, « nous dépasser et aller au-delà de nos intérêts nationaux immédiats afin de pouvoir tisser collectivement un nouvel ordre international qui reflète les besoins du présent et nos aspirations pour l’avenir ». Bref, nous pourrons contribuer à construire une politique de l’humanité. »

Valérie Gonçalvès, cadre chez un grand fournisseur d’électricité,  membre du Conseil national du PCF, syndicaliste dans le secteur de l’énergie, responsable de la commission énergie du Parti communiste français, co-autrice de Énergie et communisme (Éd. Manifeste, 2021)

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